Orange de gris
"Orange pour vous donner envie de croquer le soleil".
Je dois dire que je n'ai jamais compris cette phrase, les publicitaires sont parfois difficiles à suivre. Ce sont les poètes de notre époque, incompris parfois. Peut-être que dans quelques années un professeur de littérature à la ramasse criera au génie mais pour le moment tout ce que cette phrase m'évoque c'est de la colère.
Cela me gâche la vue, moi qui m'étais porté volontaire pour les travaux de voiries dans le comté d'Orange - D’où le panneau, faire une publicité pour son propre comté dans ce comté ça n'a pas de sens! -
En prison le seul moment où vous pouvez voir l'extérieur de ces immenses murs de béton gris c'est soit d'en sortir - après avoir purger sa peine ou réussir à s'en évader, vous avez le choix - ou de participer aux travaux d’intérêts généraux.
Le gris devient rapidement déprimant, accentuant ce sentiment de claustrophobie qui vous gagne au fil des jours. Si nos tenues n'étaient pas orange, je jurerais que mes yeux ne voient plus de couleurs. Le comble pour un peintre! Vous imaginez ? C'est ce que j'étais avant d’être incarcéré ici, avant de me faire chopper par la Police à passer au feu orange sans permis avec de la cocaïne dans la boîte à gants.
Je me sens comme Ray Charles a qui on parlerait de couleur musicale.
De temps à autre, à l'occasion d'une bagarre générale, les couleurs reviennent dans la prison.
D'abord un peu de rouge vermillon vient amener un peu de gaieté entre ces murs. Certains gars en sont euphoriques, ça crie partout, ça tape les barreaux, pour peu on se croirait derrière les grilles d'un zoo à l'heure du petit déjeuner.
Les gardiens affolés séparent les prisonniers ou viennent finir le travail, et à ce moment-là, la joie dans les cœurs revient.
Je vois briller l'humanité dans les yeux de mes codétenus, quand l’infirmière pointe le bout de son nez accompagnée de deux grands brancardiers. Avec sa blouse blanche et ses longs cheveux blonds ondulant sur ses épaules c'est un ange venu en enfer racheter nos pauvres âmes.
Étant considéré comme toxicomane, on m'a interdit d'avoir de la peinture, les gardiens se figuraient que j'étais capable d'en ingérer pour "triper" avec.
J'en suis réduit à peindre avec mes excréments et mon propre sang.
Autant vous dire que j'aime mieux faire comme certains détenus qui parfois pour s'attirer les faveurs de la belle infirmière n'hésitent pas à se refaire le portrait en body painting, un autoportrait avec le mur ou la cuvette en acier. Un peu d’élan et un grand coup en avant.
Alors je creuse joyeusement avec ma pioche dans cette terre, pour faire mon trou, sous le ciel bleu, priant chaque jour pour qu'il ne pleuve pas et qu'il ne fasse pas gris.
Je dois dire que je n'ai jamais compris cette phrase, les publicitaires sont parfois difficiles à suivre. Ce sont les poètes de notre époque, incompris parfois. Peut-être que dans quelques années un professeur de littérature à la ramasse criera au génie mais pour le moment tout ce que cette phrase m'évoque c'est de la colère.
Cela me gâche la vue, moi qui m'étais porté volontaire pour les travaux de voiries dans le comté d'Orange - D’où le panneau, faire une publicité pour son propre comté dans ce comté ça n'a pas de sens! -
En prison le seul moment où vous pouvez voir l'extérieur de ces immenses murs de béton gris c'est soit d'en sortir - après avoir purger sa peine ou réussir à s'en évader, vous avez le choix - ou de participer aux travaux d’intérêts généraux.
Le gris devient rapidement déprimant, accentuant ce sentiment de claustrophobie qui vous gagne au fil des jours. Si nos tenues n'étaient pas orange, je jurerais que mes yeux ne voient plus de couleurs. Le comble pour un peintre! Vous imaginez ? C'est ce que j'étais avant d’être incarcéré ici, avant de me faire chopper par la Police à passer au feu orange sans permis avec de la cocaïne dans la boîte à gants.
Je me sens comme Ray Charles a qui on parlerait de couleur musicale.
De temps à autre, à l'occasion d'une bagarre générale, les couleurs reviennent dans la prison.
D'abord un peu de rouge vermillon vient amener un peu de gaieté entre ces murs. Certains gars en sont euphoriques, ça crie partout, ça tape les barreaux, pour peu on se croirait derrière les grilles d'un zoo à l'heure du petit déjeuner.
Les gardiens affolés séparent les prisonniers ou viennent finir le travail, et à ce moment-là, la joie dans les cœurs revient.
Je vois briller l'humanité dans les yeux de mes codétenus, quand l’infirmière pointe le bout de son nez accompagnée de deux grands brancardiers. Avec sa blouse blanche et ses longs cheveux blonds ondulant sur ses épaules c'est un ange venu en enfer racheter nos pauvres âmes.
Étant considéré comme toxicomane, on m'a interdit d'avoir de la peinture, les gardiens se figuraient que j'étais capable d'en ingérer pour "triper" avec.
J'en suis réduit à peindre avec mes excréments et mon propre sang.
Autant vous dire que j'aime mieux faire comme certains détenus qui parfois pour s'attirer les faveurs de la belle infirmière n'hésitent pas à se refaire le portrait en body painting, un autoportrait avec le mur ou la cuvette en acier. Un peu d’élan et un grand coup en avant.
Alors je creuse joyeusement avec ma pioche dans cette terre, pour faire mon trou, sous le ciel bleu, priant chaque jour pour qu'il ne pleuve pas et qu'il ne fasse pas gris.