Déséquilibré
Un pousseur fou sévissait dans le métro de la capitale. Je n'invente rien, ça faisait la une, t'avais qu'à lire les journaux si tu ne me crois pas. L'opinion publique était inquiète, elle l'est toujours... quoi qu'il arrive. On est comme ça nous, les français.
Les rumeurs sur l'identité ou les motivations du criminel en question allaient bon train si je puis dire sans mauvais jeu de mots. J'entendais certains évoquer de nombreuses hypothèses, du clochard "fou" à l'employé syndicaliste "fou" en mal de mouvement social. Autant de raisons différentes qui se regroupaient sous une seule idée : le criminel était forcément "fou". Tout le monde était d'accord sur ce point et tous étaient proches de la vérité. Les crimes n'étaient pas réguliers en fréquence, on pouvait passer des mois sans en constater un. Cela trouvait son explication dans le fait que notre pousseur "fou" en était bien un. Habitué des séjours psychiatriques, il rentrait et sortait de l'hôpital comme si c'était chez lui et dans ce sens c'était presque devenu le cas.
Sans un sou, il déambulait dans les couloirs du métro. On ne peut pas dire que la sécurité l'empêchait de franchir les grilles. Son petit plaisir était de marcher à cloche-pied en sifflotant jusqu'aux escaliers. Une fois arrivé en haut, il posait ses fesses sur la rambarde et se laissait glisser sur celle-ci jusqu'en bas. Il n'aimait pas les touristes ni les personnes âgées, qui se pressaient devant les portes en bouchant la sortie des passagers mais ce qu'il détestait encore plus c'était les jeunes cadres dynamiques en costard qui marchaient le long du rebord, téléphone collé à l'oreille. La manœuvre était facile il suffisait d'une légère impulsion du doigt ou de simuler un étirement et le cadavre grillait déjà sur les voies. Il adorait faire ça, ça lui rappelait le jeu de son enfance du "c'est toi le loup". En bon mauvais perdant, il faisait en sorte de gagner à tous les coups sans possibilité de revanche.
Un jour, à l'entrée de la station du métro, il croisa une femme et son jeune fils, âgé de 8 ans, l'âge parfait pour un compagnon de jeu pensa-t-il. Notre déséquilibré, se plaça derrière le petit garçon qui lui sourit et lui fit signe de la main innocemment en le voyant. Il interpréta cela comme une invitation à participer au jeu. La mère remarqua que les lacets de son enfant étaient défaits. Elle le somma de les rattacher comme elle lui avait montré. Le petit secouait la tête d'un air désapprobateur. Elle lui dit qu'il risquait de tomber et de se faire mal. Une voix féminine enregistrée annonça que le train était à l'approche dans le haut-parleur. Le décompte du départ était lancé.
5...
Le fou recula d'un pas pour prendre son élan alors que le petit garçon se baissait, résigné à obéir à sa mère.
4....
Ce qu'il ignorait à cet instant précis c'est qu'un autre jeu allait commencer dont il ne connaissait pas les règles, un jeu qui s'appelle "saute du-con". On pouvait voir les phares du train éclairer la voie.
3....
Quand il arriva à hauteur du petit garçon il comprit qu'il ne pouvait pas le faire et eu tout juste le temps de s'arrêter ce qui le déséquilibra légèrement.
2...
Derrière lui, un attroupement de touristes japonais s'était rué sur le bord du quai. L'enfant encore accroupi avait du mal à faire de belles boucles, elles finissaient toujours par se défaire.
1...
Le déséquilibré se retourna pour faire signe aux asiatiques de ne pas pousser, mais il était trop tard, la barrière de la langue n'avait pu empêcher la bousculade. Ses jambes tapèrent contre l'enfant baissé et le firent basculer par dessus la ligne jaune.
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Les rumeurs sur l'identité ou les motivations du criminel en question allaient bon train si je puis dire sans mauvais jeu de mots. J'entendais certains évoquer de nombreuses hypothèses, du clochard "fou" à l'employé syndicaliste "fou" en mal de mouvement social. Autant de raisons différentes qui se regroupaient sous une seule idée : le criminel était forcément "fou". Tout le monde était d'accord sur ce point et tous étaient proches de la vérité. Les crimes n'étaient pas réguliers en fréquence, on pouvait passer des mois sans en constater un. Cela trouvait son explication dans le fait que notre pousseur "fou" en était bien un. Habitué des séjours psychiatriques, il rentrait et sortait de l'hôpital comme si c'était chez lui et dans ce sens c'était presque devenu le cas.
Sans un sou, il déambulait dans les couloirs du métro. On ne peut pas dire que la sécurité l'empêchait de franchir les grilles. Son petit plaisir était de marcher à cloche-pied en sifflotant jusqu'aux escaliers. Une fois arrivé en haut, il posait ses fesses sur la rambarde et se laissait glisser sur celle-ci jusqu'en bas. Il n'aimait pas les touristes ni les personnes âgées, qui se pressaient devant les portes en bouchant la sortie des passagers mais ce qu'il détestait encore plus c'était les jeunes cadres dynamiques en costard qui marchaient le long du rebord, téléphone collé à l'oreille. La manœuvre était facile il suffisait d'une légère impulsion du doigt ou de simuler un étirement et le cadavre grillait déjà sur les voies. Il adorait faire ça, ça lui rappelait le jeu de son enfance du "c'est toi le loup". En bon mauvais perdant, il faisait en sorte de gagner à tous les coups sans possibilité de revanche.
Un jour, à l'entrée de la station du métro, il croisa une femme et son jeune fils, âgé de 8 ans, l'âge parfait pour un compagnon de jeu pensa-t-il. Notre déséquilibré, se plaça derrière le petit garçon qui lui sourit et lui fit signe de la main innocemment en le voyant. Il interpréta cela comme une invitation à participer au jeu. La mère remarqua que les lacets de son enfant étaient défaits. Elle le somma de les rattacher comme elle lui avait montré. Le petit secouait la tête d'un air désapprobateur. Elle lui dit qu'il risquait de tomber et de se faire mal. Une voix féminine enregistrée annonça que le train était à l'approche dans le haut-parleur. Le décompte du départ était lancé.
5...
Le fou recula d'un pas pour prendre son élan alors que le petit garçon se baissait, résigné à obéir à sa mère.
4....
Ce qu'il ignorait à cet instant précis c'est qu'un autre jeu allait commencer dont il ne connaissait pas les règles, un jeu qui s'appelle "saute du-con". On pouvait voir les phares du train éclairer la voie.
3....
Quand il arriva à hauteur du petit garçon il comprit qu'il ne pouvait pas le faire et eu tout juste le temps de s'arrêter ce qui le déséquilibra légèrement.
2...
Derrière lui, un attroupement de touristes japonais s'était rué sur le bord du quai. L'enfant encore accroupi avait du mal à faire de belles boucles, elles finissaient toujours par se défaire.
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Le déséquilibré se retourna pour faire signe aux asiatiques de ne pas pousser, mais il était trop tard, la barrière de la langue n'avait pu empêcher la bousculade. Ses jambes tapèrent contre l'enfant baissé et le firent basculer par dessus la ligne jaune.
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